La poupée qui fait oui Agnès de Clairville

Résumé

Fin des années 1980. Une école d’ingénieurs bâtie dans une ville nouvelle à l’écart de tout. Un bizutage, des soirées, les premières fois. Arielle, seize ans, issue de la bonne société versaillaise, fantasme les garçons et l’amour physique. Alors qu’elle se laisse porter par cette vie loin des siens, Éric, un étudiant magnétique de six ans son aîné, va croiser son chemin.
Le départ de sa fille est l’occasion pour Inès de revivre sa propre histoire : la rupture avec un monde clos et pétri de traditions, la liberté d’une chambre seule, et puis, très vite, une grossesse, la solitude et le retour à la case départ.
Alors qu’Arielle s’initie à l’amour et cherche son père biologique, les terreurs d’Inès se font de plus en plus prégnantes. Et si un pesant silence s’immisçait dans leur histoire de filles ? Et si la chair de sa chair entrait elle aussi en amour par sidération ?

Ma note

La déchirure

J’ai lu La poupée qui fait oui pour le Prix Harper Collins Poche 2024. Et les filles du groupe ont toutes été unanimes : il est incroyable. Forcément, l’attente était grande. Et pourtant, je n’ai pas lu le résumé. Ainsi, j’ai découvert un roman sur la dépendance affective sous emprise d’un homme bien plus âgé. Une fiction qui n’est pas sans rappeler l’histoire réelle du Consentement de Vanessa Springora, par certains aspects. Si je n’ai pas eu de coup de coeur, je sais très bien pourquoi : ma sensibilité a été mise a rude épreuve pour une bonne raison. J’ai été bien trop touchée puisque l’histoire d’Arielle… je l’ai vécu. Alors, une bulle protectrice m’a enveloppé en me disant « tu t’en occuperas le moment venu ». 

"Un voile gris jeté sur de multiples souvenirs se retire, chape de brouillard qui s'évapore au-dessus d'un paysage métamorphosé. La lumière froide du matin d'hiver fait ressortir des détails invisibles jusqu'alors."

Une société dérangée. La nôtre.

La poupée qui fait oui est effrayant à lire et pourtant si réaliste. Justement trop réaliste. Et à la fois si nécessaire. Parce qu’Agnès de Clairville met les mots sur l’innommable. Sur la manipulation affective et sexuelle d’une jeune fille dans les années 80 à qui on n’a pas expliqué grand chose, tout en grandissant dans une société qui glorifie le sex drugs and rock and roll. A côté de quoi, le roman se lit aussi terriblement vite. J’ai été happée dans cette spirale malsaine, lisant l’horreur. Reconnaissant parfois ma propre histoire. Parce qu’il a 22 ans. Elle en a 16. Pourquoi serait-ce donc un problème ? Mon cerveau bug. Et entre les lignes, l’emprise, parfaitement visible. La relation de pouvoir. Et cette jeune fille qui n’a pas conscience de l’anormalité des faits. 

La poupée qui se tait

L’histoire d’Arielle est aussi celle de sa mère. Une histoire silencieuse, qui se joue entre les non-dits et la crainte de voir l’histoire se répéter. Peut-elle être évitée entourée de secret ? La prise d’indépendance se fait dans un abîme de solitude qui ne peut que broyer le cœur. Et elle se fait sous le regard d’adultes conscients mais qui ne disent rien. « Après tout, c’est son problème, à la petite Arielle. Elle ferait mieux d’ouvrir les yeux…  ou de dormir dans son propre lit… » Rejeter la faute sur la victime tout en glorifiant l’agresseur, voici la société dans laquelle nous vivons. Et c’est par tous ces aspects qu’Agnès de Clairville propose un roman percutant et troublant, qui dénonce, et remet en lumière par bien des aspects notre propre histoire parfois. En tous cas, pour moi. 

Le Prix Harper Collins Poche 2024

2 commentaires

    1. Oui totalement.. Mais étonnamment, ça fait aussi du bien de se dire qu’on n’est pas toute seule. C’est horrible à dire mais c’est déculpabilisant. Cela renforce l’idée que ce n’est pas moi le problème, mais bien l’homme plus âgé.

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